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La danse est-elle normale ? Gérard Mayen, Mouvement.net, 4 juillet 2012
Balade chorégraphique pré-estivale
Montpellier Danse bat son plein et le Festival d'Avignon s'apprête à prendre le relais, à l'heure où ces lignes sont écrites. Or on ne se résout pas à passer par pertes et profits critiques, quelques furieuses impressions ressenties ici et là ces dernières semaines, dans l'écrin de manifestations bien plus modestes.
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Pisani libère
Martine Pisani invitait le lendemain (Uzes Danse) à un tout autre voyage. As Far As The Eye Can Hear dégage un gigantesque espace d'évolution au détour des prés arborés du parc du Duché lui-même tendu sur un vaste panorama paysager de garrigues et de pinèdes. Assez bouleversant. Il y a quelque chose de Tati dans les incongruités magnifiques des courses, marches, rampés, chutes, un rien burlesques, volontiers insolites, des trois interprètes masculins de cette orchestration de l'in situ. C'est toujours minimal. Il peut suffire de tirer au ras du sol, et faire tourner autour des troncs des arbres, un tas informe de bâches plastique au bout d'une très longue corde : et c'est toute une présence mystérieuse, une intervention discrète, qui bouleverse le cadre. Il peut encore se faire de planter ici ou là un panonceau neutre, mais c'est alors l'homme planté à côté qui se transfigure, ainsi que tout l'espace que par là il anime (auquel il donne âme). Plus nette, une remontée depuis le bas, tout au fond du champ, des trois zigues jetant devant eux des cailloux qu'ils ramassent pour les jeter encore et encore et finir par affoler en douceur la perplexité des rangs de spectateurs assis à la frange tout en haut du site. Bref, cette pièce de Martine Pisani est un bonheur de transusbstantation tendue vers le brouillage inventif des lignes trop souvent paresseuses cadrant un regard absorbé par l'ordonnancement d'un paysage. Cette fois, enfin libres.