Mise en orbite d’un flottement physique généralisé des corps gravitaires. Gérard Mayen dansercanalhistorique.com, avril 2014

Rien n’est établi est une anagramme d’Albert Einstein.
Voilà qui met sur la piste du projet de Martine Pisani dans sa nouvelle création. Soit la quête d’une expression poétique d’un principe général de relativité. Rien n’y vaut qu’en fonction des points occupés par chacun, mais surtout des mobilités incessantes d’axes qui en découlent, par mise en relation, perpétuellement mouvementée. Ce principe est évidemment chorégraphique. Qu’a-t-il donc de singulier, lorsque appliqué à l’écriture de cette pièce ?
La cage de scène de Rien n’est établi est intégralement vidée, déshabillée, rendue à l’état d’une maquette de vaste espace cosmique, ouvert à ses lois gravitaires. L’habite un souffle de zéphyr, subtil grondement de modulation sonore, orchestré par Gerome Nox (ainsi surprenant, tant on l’a connu plus furieusement bruitiste).

Les cinq danseurs qui s’y engagent sont gainés dans des accoutrements très moulants, seyants et subtilement décalés. Leur économie corporelle n’est pas loin de rappeler un univers à la Tati, à la fois empreint d’évidence simple, et pour autant à l’essai, un peu penché, vaguement hébété. C’est un état de disponibilité, au bord d’un laisser-aller à la gravitation, au contact, au poids qui attire, mais encore hésitant, comme un funambule naïf.

On cherche son terrain, on expérimente le pas, on tâte l’espace et les présences, dans ce matin des questionnements, où rien n’est établi. Doucement, objets et usages sont à réinventer : ballon en toupie, corde spaghetti, rouleau de scotch en bracelet, sac plastique somptueusement vide. Tout un désordre se jette à l’absurde. Rien n’est donné qui ne soit à expérimenter. Les silhouettes d’un Philippe Quesne ne paraissent pas très loin, dans une humeur cotonneuse et rêveuse, où les personnages tendent à la dilution.

Au péril du vide, désaxé de la gravitation, suspendu et penché, au bord de choir, lent à gésir, ce monde où Rien n’est établi, faussement doux, frissonnant d’un courant d’air, paraît en attente des plus graves questions. Évidemment, son observation requiert un œil prêt à vaciller dans la danse, chancelant comme un fantôme de relation au monde. Tout des corps médite, au grand élan homogène et abstrait, de lois qui nous dominent, nous entraînent, nous soutiennent. Tout de même.

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