David Bernadas, Mouvement.net 13.11.2002
Avec un détachement jubilatoire, Martine Pisani souligne ces impossibilités qui nous tiennent au corps, ces pulsions qui nous empêchent et qui nous bloquent. Martine Pisani ne verse pas dans le spectaculaire. On se souvient de sans, irrésistible trio masculin pour lequel elle se débarrassait, avec humour et détachement, des artifices de la représentation. Avec Slow down elle poursuit son oeuvre, développe une recherche personnelle et interroge les limites du comment être-là, sur une scène. Absence, effort, concentration, poids, fatigue, vitesse, élan, paresse... en travaillant avec un groupe plus important que d'habitude, la chorégraphe a su rester attentive à ces signes, parfois si ténus, qui se dégagent d'une présence, au travers des expressions du visage notamment. Le visage "comme médiateur de la rencontre avec l'autre" indique-t-elle. "Toujours nu, il est cependant secret, singulier, il est absorbé de l'intérieur".
"Slow down": Ralentir. En proie à des pulsions contradictoires, les six interprètes semblent se débattre avec cette injonction. Ils cherchent du regard, hésitent, ressassent. Le plateau est évidé, débarrassé de toute ornementation scénographique ou progression dramaturgique. Disparaissant tour à tour derrière un mystérieux panneau noir, chacun des interprètes semble signifier au spectateur combien il est unique - en même temps qu'il apparaît remplaçable, interchangeable puisque pendant la quasi totalité de la pièce, ils ne sont que cinq à apparaître au regard. Dans ce délicat exercice de réunion, lorsque le danseurs se réunissent en rang, improvisent un contact au sol ou encore fredonnent en coeur des standards de la chanson pop, c'est toujours avec la même et improbable cocasserie, le même plaisir jubilatoire.
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